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vendredi 9 juin 2017

Le silence




                  Une relation naît de la communication, verbale, écrite, voire tactile.

      Quelle que soit la forme de la rencontre, pour qu'il y ait lien il faut qu'il y ait "contact". Cela se produit généralement par un mouvement spontané de l'un vers l'autre, sans volonté consciente : un jour on se rend compte qu'un lien a été établi.

                 Pour différentes raisons il arrive que, par la suite, l'une des deux personnes décide qu'elle ne désire plus être dans le même élan. Dès lors apparaît un "silence", donc une "distance", qui ne représente que le décalage d'investissement de chacun des partenaires dans la relation. L'un ou l'autre n'ont plus le même désir de communication. C'est un point d'inflexion, temporaire ou durable, dans la construction du lien. Il est déstabilisant puisqu'il marque une "rupture" dans la dynamique relationnelle. Il va nécessiter une adaptation volontaire, et non plus spontanée, aux besoins de l'autre. L'un souhaite "plus", tandis que l'autre désire "moins".
                  Le silence relationnel est la marque de cette divergence. Mal géré, il peut aboutir à des tensions d'autant plus fortes que le lien affectif est soutenu. Et chaque partenaire risque d'être tenté par une imposition de son point de vue, alors que les besoins sont contradictoires.
                  Il n'y a aucun intérêt à entrer dans une logique d'opposition, sous peine de blesser la relation. Imposer le silence est tout aussi violent que d'imposer la parole. L'écoute des besoins de l'autre, du moment qu'ils sont exprimés, et la base du respect et de la confiance.
                 Une autre forme de silence imposé existe aussi sous des formes plus pernicieuses. Il s'agit du silence comme instrument de chantage affectif. Ou pour être plus cinglant : comme instrument de torture. Le pouvoir de celui qui impose le silence est imparable. D'une certaine façon l'autre est obligé de s'y soumettre... Toute tentative de restauration de contact devient intrusive, donc potentiellement aggravante.
                 Savoir que l'autre souffre du silence, ne pas réagir face à cette souffrance, ne pas chercher à l'apaiser, peut donner un grand pouvoir. Tout en sachant que la réciproque est vraie en matière de chantage affectif : exprimer sa souffrance en vue de rompre un silence insupportable est aussi une forme de manipulation tendant à la culpabilisation de l'autre.
               Le silence est une façon de dire « je ne souhaite pas être en relation avec toi en ce moment ». Ces mots sont sans doute difficiles à exprimer, et à entendre.
               Et le minimum qu'on puisse attendre d'une relation de confiance, c'est que les choses soient dites. Le silence non expliqué est une fuite qui laisse à l'autre le soin de trouver tout seul les explications manquantes. En ce sens le silence imposé est un puissant destructeur de confiance. Tout comme la communication construit une relation, le silence non-expliqué (non communiqué) détruit. Le silence imposé est un acte mortifère dans une relation.
              Et cet essentiel peut parfois être de dire simplement : ton silence m'inquiète.

              Ce qui est certain, c'est que du silence ou de la parole, la seule chose qui détruise la relation est la non-écoute des besoins de l'autre.
              Celui qui a eu besoin de silence peut vouloir se ressourcer ailleurs . Et si le temps de silence conduit à un éloignement... c'est qu'il devait en être ainsi, parce que la vie est mouvement et constante évolution. On ne force pas les choses en matière de ressenti : c'est ou ce n'est pas, et la volonté n'y peut rien.
               Il y a un silence dont je n'ai pas parlé : quand il n'y a plus rien à se dire. Quand le temps de relation est passé dans une sorte de vide affectif, ne persistant que par habitude ou conventions. Je pense à certains liens qui n'ont plus rien à se dire dans leur vie de cohabitation. Mais peut-on encore parler de relation, lorsque c'en est à ce point ?